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MOSCOU, UN KIOSQUE ET DEUX CORBEAUX POUR SEUL POLITIQUE ET URBAIN BAROMèTRE

Par Stany Cambot, vendredi 29 janvier 2016

Thème : Eastern

Dès que j'arrive ici, j'entends le crack de ma mécanique qui casse. Emmuré dans ma langue, je ne suis plus qu'oeil, pointu, roulant fou dans l'orbite du désir de connaître. Alors, tendu comme une fibre lentement arrachée au poulpe séché lymphatique, le nerd optique se déroule puis enroule les réalités proches pour y chercher le sens du tout.

Le dégel en flaques, souvenir des monticules de neige d'hier et de l'année d'avant quand ils entouraient encore le kiosque de mon voisin Prodoukti. Celui-ci, après avoir déménagé trois fois déjà; du trottoir au trottoir, puis du trottoir à l'indéterminé espace entre public et privé de la cour de l'immeuble, « pour échapper aux ennuis »; a lui aussi fondu. Disparue, la structure préfabriquée légère de sa Palatka, reliée aux pylônes par une tresse de cordons électriques... Disparue. C'est désormais derrière la porte vitrée de la sortie de secours de l'immeuble que l'on distingue, entre les boules multicolores de ses fruits empilés comme des bonbons en bocal, son grand sourire.

Aussi certain que la neige fond en eau pour de nouveau se figer en glace sur laquelle tout Moscou se casse la gueule, le nomadisme à pas comptés de mon voisin Prodoukti en dit long sur la ressaisie de l'espace (public?) opérée par les autorités. Pour qu'au printemps, éclosent de nouveau les planches de l'architecture légère et branchée dans les parcs et les allées, il faut semble-t-il que s'accomplisse au coeur noir de l'hiver le sacrifice des tôles spontanées du commerce informel. C'est à ce prix que le soleil de la ville cool réapparaîtra pour faire fondre encore davantage l'hiver mythique et multipolaire des années 90.

De la fenêtre, dix étages plus bas, l'emplacement du kiosque est vide. En face, les travaux de réhabilitation d'un immeuble désaffecté, en résidence jaune, ont chassé du toit, vers un ailleurs indéterminé, le couple de corbeaux qui y nichait.

tag : forains marches Moscou économie informelle

Réalisation : Échelle inconnue

MAKHNOVTCHINA
MAKHNOVTCHINA
Makhnovtchina est un repérage actif des nouvelles mobilités urbaines et périurbaines à l'heure des grands projets de métropolisation. C'est un atelier itinérant de production participative d'images (fixes, vidéos, ou multimédia), de textes, de cartes, de journaux, « Work in progress ». Ce travail mené par des architecte, géographe, créateur informatique, sociologue et économiste vise à terme la proposition d'architecture ou d'équipements mobiles et légers. Ce travail vise, en outre, à explorer les futurs vides ou terrae incognitae que créent ou créeront les métropoles. Il propose une traversée du terrain d'accueil pour « gens du voyage » au marché forain en passant par les espaces des nouveaux nomadismes générés par la déstructuration des entreprises, notamment de réseau (EDF, GDF, France télécom...), ainsi que par les campings où, faute de moyens, on loge à l'année. Une traversée, pour entendre comment la ville du cadastre rejette, interdit, tolère, s'arrange, appelle ou fabrique la mobilité et le nomadisme. Ce projet de recherche et de création s'inscrit dans la continuité de certains travaux menés depuis 2001 : travail sur l'utopie avec des « gens du voyage » (2001-2003), participation à l'agora de l'habitat choisi (2009), réalisation d'installation vidéo avec les Rroms expulsés du bidonville de la Soie à Villeurbanne (2009) et encadrement du workshop européen « migrating art academy » avec des étudiants en art lituaniens, allemands et français (2010). Il tente d'explorer les notions de ville légère, mobile et non planifiée avec ceux et celles qui les vivent.