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RUBRIQUE NOIRE DU CAFÉ MAGIQUE À L'INSTANTANÉ VOYAGEUR

Numéro 4


Ça tourne en rond depuis un moment. Alors quoi, pour dire noire ? Le café ukrainien que peu probablement buvait Makhno ? Un projet de café mobile ? Les cafés qu'on a avalé sur les « places » et terrains des voyageurs ? Les cafés roumains des bidonvilles que l'on dit Rroms ? Ça tourne mais pas de quoi en faire un article rendant hommage à la noirceur de la boisson des dieux.

Alors on fouille le web pour y trouver « j'ai toujours détesté le café » un article de la linguiste Marie Treps attaché au CNRS, récit anthropologique qui voit (évidemment) dans le café un rituel de cette obscure tribu d'indiens que sont les Manouches. Tendre observatrice en safari, elle conte que « chez les Manouches on en boit des litres », que, même vite expédiés, les cafés ponctuent la journée. Une visite, un café ! Rendez-vous compte ! Je regarde nos collections de cafetières italiennes qui trônent dans l'atelier, les grandes, les petites, celles au joint pété qui fuient et bullent sur la plaque électrique à force d'être utilisées. Chez nous aussi, bizarrement, une visite, un café ! C'est la première chose proposée en partage à nos visiteurs. Peut-être ferions-nous bien de nous placer sous un oeil anthropologique expert. Puis je revois la cafetière éternelle sur le bord du poêle de la maison ouvrière de mes grands-parents. A chaque visite un café ! Étaient-ils manouches infiltrés ? Et puis d'un coup, ça me revient ! Souvenir encore : le type, les coudes posés sur la toile cirée de la pièce unique, raconte comment il a arrêté de fumer. La visite chez un vieux Manouche qui, en échange d'une somme, qui représentait pour l'enfant que j'étais un sacré nombre de pièces jaunes, lui avait fait boire une infecte mixture à base de café. « j'ai dégueuler pendant trois jours, mais après, impossible de refumer une cigarette ! » disait-il. Tous les éléments étaient là : la nuit, le vieux, la potion, le sorcier pendant naturel à la gitane diseuse de bonne aventure qui lit dans le marc. Le noir breuvage retrouve alors dans le fantasme partagé (par gadjés et Manouches) son auréole mystérieuse, mystique !
Plus prosaïque, il existe un autre « café manouche », un de ceux qui vous empêche de dormir et que certains cadres affectionnent paraît-il désormais ; un café dans lequel on laisse infuser une cigarette. Sans doute le café que notre linguiste identifie comme celui du « troisième cercle » qu'elle n'a pu visiter. Ce café bu lorsque l'on veille les morts pendant plusieurs jours sans dormir.
C'est dans le fantasme en habit scientifique ou en civil que se joignent volutes noires du breuvage et circonvolutions supposées des « fils du vent ». Dans le pli de la page du récit sociétal, la tache brune du café joue au test de Rorschach. On finit bien par y voir ce que l'on veut. A lire les liens entre café et « mobiles » on voit surtout apparaître un nouveau couple mystérieux de la discrimination positive. Ainsi, après la gitane et ses arts divinatoires, voici le manouche et son café. Tout est à sa place !
A l'épreuve du réel, c'est autre chose ; voilà un an qu'on ne s'est pas vu et Fredo nous invite à prendre le café dans la camping. Il allume la bouilloire et sort un pot de café instantané... Le réel est rétif aux fantasmes même les plus savants.

Sommaire du numéro 4
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EDITO JOURNAL À TITRE PROVISOIRE N°4 : MAKHNOVTCHINA / EXPULSÉE PAR LE CADASTRE, UNE AUTRE VILLE : MOBILE
DES ENCLAVES NOMADES DE FAIT ! ROUEN QUAIS RIVE GAUCHE : TRAVELLERS, FORAINS, OUVRIERS DE LA CATHÉDRALE, CAMPING CARISTES.
« ESPACE MOBILE »
DE LA FOIRE AU LOGICIEL LIBRE : ALLERS ET RETOURS PAR ARNAUD LEMARCHAND
HOMMES DES CAVERNES, TRAVAILLEURS NOMADES, MANOUCHES ET RETRAITÉS
RUBRIQUE NOIRE DU CAFÉ MAGIQUE À L'INSTANTANÉ VOYAGEUR
MKN-VAN ATELIER MOBILE, CARAVANE OUTIL
NOMADISME ET MÉTROPOLE REJET, DÉTOURNEMENT ET RÉCUPÉRATION
LE NIGLOBLASTER, RÉPONSE À L'IMPOSSIBLE CARTOGRAPHIE DE LA MOBILITÉ

Réalisation : Échelle inconnue

MAKHNOVTCHINA
MAKHNOVTCHINA
Makhnovtchina est un repérage actif des nouvelles mobilités urbaines et périurbaines à l'heure des grands projets de métropolisation. C'est un atelier itinérant de production participative d'images (fixes, vidéos, ou multimédia), de textes, de cartes, de journaux, « Work in progress ». Ce travail mené par des architecte, géographe, créateur informatique, sociologue et économiste vise à terme la proposition d'architecture ou d'équipements mobiles et légers. Ce travail vise, en outre, à explorer les futurs vides ou terrae incognitae que créent ou créeront les métropoles. Il propose une traversée du terrain d'accueil pour « gens du voyage » au marché forain en passant par les espaces des nouveaux nomadismes générés par la déstructuration des entreprises, notamment de réseau (EDF, GDF, France télécom...), ainsi que par les campings où, faute de moyens, on loge à l'année. Une traversée, pour entendre comment la ville du cadastre rejette, interdit, tolère, s'arrange, appelle ou fabrique la mobilité et le nomadisme. Ce projet de recherche et de création s'inscrit dans la continuité de certains travaux menés depuis 2001 : travail sur l'utopie avec des « gens du voyage » (2001-2003), participation à l'agora de l'habitat choisi (2009), réalisation d'installation vidéo avec les Rroms expulsés du bidonville de la Soie à Villeurbanne (2009) et encadrement du workshop européen « migrating art academy » avec des étudiants en art lituaniens, allemands et français (2010). Il tente d'explorer les notions de ville légère, mobile et non planifiée avec ceux et celles qui les vivent.